

Édition française de la grande carte de l'Amérique du Nord en 8 feuilles de John Mitchell, carte très important de la region qui a marqué la cartographie britannique.
La carte s'étend de la Louisiane à l'ouest jusqu'à l'océan Atlantique à l'est, et d'une partie de la baie d'Hudson au Canada "Nouvelle France" au nord jusqu'à la Floride et le golfe du Mexique au sud. Mitchell a réussi à illustrer les territoires britanniques en Virginie, dans les Carolines et en Géorgie. C'est cet élément qui a donné à la carte sa valeur politique importante à l'époque. Dans le coin supérieur gauche, elle comprend une carte de la baie d'Hudson et du Labrador, basée sur les dernières cartes levées. L'embellissement de la carte est réservé à un grand cartouche de titre élégant et à deux roses des vents.
Sources de la carte de Mitchell
La carte Mitchell est considérée comme intrigante et intéressante par de nombreux savants, car elle a été réalisée par l'auteur alors qu'il résidait en Angleterre, et pourtant elle se distingue par son extrême précision dans la représentation des colonies, des forts, des routes de voyage, des lacs, des rivières, des villages... Cette carte doit être considérée comme une production conjointe de George Montagu Dunk (1716-1771), deuxième comte de Halifax, et de Mitchell. Grace a la position importante du comte dans le gouvernement britannique en tant que président du Board of Trade, Mitchell et lui avaient un accès direct au matériel cartographique manuscrit reçu directement des colonies d'outre-mer. En juillet 1750, Halifax a envoyé des instructions urgentes à tous les gouverneurs des colonies d'Amérique du Nord, demandant des levés précis et des cartes des frontières coloniales, ainsi que des informations sur l'expansion française. (1) Les colonies qui ont répondu en envoyant des cartes et des comptes rendus textuels sont : les officiers londoniens de la Compagnie de la Baie d'Hudson, le gouverneur de la baie du Massachusetts, le gouverneur du New Jersey, le lieutenant-gouverneur de Pennsylvanie, le gouverneur par intérim de Virginie, le gouverneur de Caroline du Nord. Ces gouverneurs envoient respectivement les documents suivants : (2)
1- Une carte des territoires au nord de la Nouvelle-France ;
2- Une grande carte de la Nouvelle-Angleterre spécialement levée et compilée par Richard Hazzen ;
3- Une impression de la carte de Lewis Evans de la Pennsylvanie, du New Jersey et de New York ;
4- Version manuscrite de la même carte ;
5- Carte de la province de Virginie par Joshua Fry et Peter Jefferson ;
6- Plan de la Virginie et de la Caroline du Nord ;
La valeur politique de la carte au XVIIe siècle
La carte de Mitchell a joué un rôle politique important depuis sa première édition en 1755, à une époque très critique du siècle. Au milieu du XVIIIe siècle, les puissances coloniales se livraient une concurrence acharnée pour obtenir des territoires dans ce qui est aujourd'hui les États-Unis d'Amérique. Grâce à Halifax, des exemplaires de cette carte ont été largement distribués parmi les fonctionnaires. Cette carte est rapidement devenue la carte de référence de la région jusqu'à la fin du siècle, et a été utilisée pour résoudre les conflits frontaliers dans la région ; elle était la source des fonctionnaires pour la plupart des traités américains de l'époque (3). Notamment par John Jay pour le traité de Paris de 1783, qui mettait fin à la guerre d'Indépendance américaine et reconnaissait l'indépendance des Etats-Unis. Elle a également été utilisée par Nicolas King pour la carte qu'il a préparée pour Meriwether Lewis, sur la recommandation de Thomas Jerfferson. Ce dernier considérait cette carte comme une source de confiance et reconnaissait la précision de l'auteur, sachant que les sources de Mitchell provenaient directement des autorités britanniques. Cette popularité est due à la révision permanente de la carte par les auteurs, qu'Edney qualifie dans son article de "Imperially Expansive Map" (carte impérialement expansive). Mitchell a mis à jour sa carte avec des notes au fur et à mesure que les territoires de la Grande-Bretagne et de la France s'étendaient. Il convient également de noter que la première édition de cette carte a été publiée un an avant la guerre de Sept Ans entre les Français et les Indiens.
La publication de la carte
Mitchell a achevé le manuscrit de cette carte en 1750. Le premier état de la carte a été publié en 1755 par Andrew Miller. Selon Tooley, 7 états de cette carte ont été publiés entre les années 1755 et 1775. La deuxième édition de cette carte publiée en 1757 est rapidement reconnaissable car elle présente des blocs de texte ajoutés. Après la mort de Mitchell en 1768, la société Jeffreys and Faden achète les plaques de cuivre de la carte et réimprime 3 éditions en 1773, 1774, et 1775. Outre les éditions anglaises, cette carte a été publiée en français, en néerlandais et en italien. (4) Le présent exemplaire est la traduction française de Georges-Louis Le Rouge, publiée en 1777 après quelques corrections apportées par M. Hawkins en 1776.
Références :
(1) Edney, Matthew H. (2008). "John Mitchell's Map of North America (1755): A Study of the Use and Publication of Official Maps in Eighteenth-Century Britain" Imago Mundi. 60(1), pp. 63-85.
(2) Ibid, pp. 72
(3) Tooley (1985). "A sequence of Maps of America". The Mapping of America. London: The Holland Press, pp. 317
(4) Ibid.
(5) Tooley [54]